Itinérance en bivouac : les bonnes pratiques pour une nuit réussie
Poser sa tente au milieu de la montagne et se réveiller avec le lever du soleil sur les sommets : un rêve que de nombreux amoureux de la pleine nature cherchent à réaliser. Mais au-delà de la carte postale, un bivouac réussi est un bivouac respectueux du milieu, qui n’abîme pas ce que nous sommes venus rechercher : le calme et la beauté d’une nature préservée. Voici quelques bonnes pratiques à respecter pour un bivouac écoresponsable.
Vérifier la réglementation
Dans le parc national des Ecrins, le camping est proscrit : il est interdit de laisser sa tente en place toute la journée et d’établir un campement pour plusieurs jours. Mais le bivouac est toléré avec une petite tente ne permettant pas la station debout, sur une plage horaire précise : de 19h à 9h, et à une distance correspondant à une heure de marche des routes et des limites marquant l’entrée en cœur du parc (drapeaux bleu blanc rouge). Vous devez être profondément avancé en cœur de parc, loin des grands axes, pour avoir le droit de bivouaquer.
Des exceptions ponctuelles peuvent exister. Ainsi, certains grands lacs de l’Oisans très fréquentés (lac de la Muzelle, lac du Lauvitel) exigent de s’installer dans des aires de bivouac définies, afin de limiter le piétinement. A l’inverse, le bivouac peut être toléré à moins d’une heure des limites du cœur de parc, à proximité de refuges situés sur les grands sentiers itinérants, comme le GR54.
Choisir son emplacement de façon judicieuse
Pour le confort optimal des randonneurs et pour respecter au mieux les milieux traversés, il est important de bien choisir son emplacement de bivouac. Choisissez une zone la plus plate possible, peu caillouteuse, et évitez une trop grande exposition au vent.
Bien que la tente ne puisse être montée qu’après 19h, dans le respect de la réglementation du parc, il est judicieux d’arriver sur place un peu plus tôt, et de veiller à être au point de bivouac souhaité avant la nuit. Arriver de jour permet de vérifier attentivement l’emplacement choisi, afin d’éviter les dangers, l’inconfort et les dégradations environnementales.
On évitera les zones de tourbière et la trop grande proximité des lacs, non seulement pour limiter le piétinement des zones humides fragiles et riches en biodiversité.
Méfiez-vous des torrents, dont le débit peut augmenter de façon soudaine et spectaculaire en cas d’orage en amont ou de rupture glaciaire brutale. De nombreux cours d’eau du parc national des Écrins peuvent entrer rapidement en régime torrentiel et représenter un danger grave, voire mortel sur les berges. Eloignez-vous des rives des cours d’eau, choisissez un endroit surélevé – la hauteur vous promet aussi une belle vue.
Pour votre sécurité, évitez aussi les zones proches des falaises, des couloirs d’avalanche ou d’éboulement, qui semblent pouvoir être impactés par les chutes de pierre ou les glissements de terrain
Le parc national des Ecrins abrite 2400 espèces végétales, dont 216 espèces inscrites à la liste rouge de la flore rare et menacée. Si vous êtes dans une prairie alpine, évitez de vous installer dans un endroit présentant une grande concentration de plantes, afin de limiter leur écrasement.
S’abstenir de tout feu
Le feu et les flammes ouvertes sont totalement interdits dans le cœur du parc national des Ecrins, et doivent être de façon générale évités partout en montagne. Le feu représente un risque d’incendie majeur, particulièrement en été lorsque la végétation est plus sèche et compromet la repousse d’une végétation déjà soumise à de longs hivers enneigés.
La seule exception possible est l’utilisation d’un petit réchaud portatif avec flamme intégrée, qui devra être utilisé avec discernement pour éviter tout risque d’incendie : à plus de 200 mètres des zones de forêts et reboisements, toujours sous surveillance étroite, jamais à l’intérieur d’une tente ou sous l’auvent de celle-ci, et en évitant absolument les zones de végétation haute et d’herbes sèches.
Ne laisser aucun déchet derrière soi
Aucun déchet ne devra être laissé derrière soi, pas même les déchets organiques : les trognons de pomme et autres restes de nourriture peuvent modifier le comportement de la faune sauvage, les inciter à se rapprocher des humains et à se détourner de leur régime naturel.
Une attention toute particulière devra être apportée à la question des excréments, qui présentent un risque sanitaire (contaminations bactériennes et des sources d’eau) et une nuisance dans les zones très fréquentées. Il est de façon générale recommandé de privilégier quand c’est possible l’utilisation des sanitaires des refuges. Veiller sinon à vous éloigner des sentiers, des cours d’eau et des lacs, et de creuser un trou pour les matières fécales. Le papier toilette (même biodégradable) devra être remporté avec soi.
Vaisselle, lessive et hygiène personnelle
Sur un trek au long cours, la question de l’hygiène vient immanquablement se poser, et il peut être tentant d’utiliser lacs et rivières pour se laver, faire sa vaisselle ou sa lessive. Mais les dommages causés à l’environnement sont réels. Tous les produits nettoyants (même ceux qui sont labellisés biodégradables, écoresponsables, etc) contiennent des substances tensioactives qui nuisent gravement à la faune et à la flore fragile des cours et plans d’eau de montagne. Il faut absolument s’abstenir d’utiliser toute forme de savon et ses dérivés dans ce milieu. On se contentera de rincer sommairement les assiettes et couverts, de se frotter avec une serviette en microfibre humide. Les vraies douches, vaisselles et lessives avec un agent nettoyant devront être réalisées dans les lieux adaptés à cet usage, en refuge ou en gîte d’étape en vallée. Adaptés aux marcheurs, ces derniers proposent des espaces de nettoyage et séchage appropriés et l’évacuation des eaux usées est gérée.
Éviter la baignade dans les lacs
Même en évitant l’utilisation de tout produit nettoyant, la baignade dans les lacs de montagne est vivement déconseillée, quand elle n’est pas interdite par un arrêté spécifique (ce qui est par exemple le cas des lacs du plateau d’Emparis). D’une part, la crème solaire, que nous utilisons tous en trek, présente un danger pour les organismes aquatiques, particulièrement problématique dans les lacs de montagne dont les volumes d’eau sont faibles et la faune, très sensible. D’autre part, une grande part de la vie aquatique (ponte et nidification, croissance des jeunes…) se concentre sur les rives et les parties les moins profondes du lac. Le piétinement va déranger, voire détruire, de nombreuses espèces.
L’approvisionnement en eau
En plein été avec les fortes chaleurs et l’effort demandé par les dénivelés importants du parc national des Écrins, on estime qu’un randonneur consommera en moyenne 3 litres d’eau par jour. Ne buvez jamais l’eau des cours d’eau et des lacs sans purification préalable, même si elle vous semble transparente et saine car elle ne l’est peut-être pas. Seules les sources vous assurent une eau propre à la consommation.
Itinérance : bivouaquer à proximité des refuges ?
La grande majorité des gardiens du parc national des Écrins autorisent le bivouac à proximité de leur refuge, sans participation financière. Il convient toutefois de respecter certaines règles de courtoisie et de venir vous présenter au gardien (ou à la gardienne) lors de votre arrivée. Le gardien pourra le cas échéant vous indiquer la zone de bivouac recommandée et les sanitaires à votre disposition. Il est possible qu’une participation financière vous soit demandée, notamment pour l’utilisation des douches (jetons de douche avec minuteur). N’hésitez pas à consommer une boisson, un goûter, afin de participer aux frais d’entretien supportés par le gardien.
Lors d’une itinérance au long cours, peut-être avez-vous prévu de vous ravitailler en refuge ? La plupart des refuges proposent boissons et snacks toute la journée (thé, café, desserts, omelettes ou quiches…). Une pause café, déjeuner ou goûter au refuge peut aussi être l’occasion de discuter avec le gardien des conditions actuelles sur les itinéraires que vous empruntez.
En revanche, les repas du soir demandent une certaine logistique et sont la plupart du temps soumis à une réservation préalable. Afin de faciliter l’organisation du gardien et de garantir la disponibilité du dîner, pensez à réserver par mail ou par téléphone, idéalement plus de 24h en avance, si vous comptez manger en refuge. De même, les refuges sont souvent en mesure de vous fournir des pique-niques pour le repas du midi, à condition d’avoir prévenu en amont : la plupart des gardiens demandent à être informés avant 18h la veille.
Alterner bivouac, refuge et gîte d’étape pour un trek au long cours
S’il est tout à fait possible d’être en autonomie totale pour quelques jours, avec une organisation optimisée et notamment grâce à l’utilisation de nourriture lyophilisée, une itinérance longue comme par exemple le GR54 - Grand Tour de l’Oisans et des Écrins appelle une logistique plus précise. Douche, vaisselle et lessive, ravitaillement en nourriture, repas plus nourrissants ou mauvaises conditions météo, de nombreuses raisons peuvent vous amener à alterner bivouac et nuit en hébergement en dur. N’hésitez pas à envisager une organisation hybride de votre randonnée itinérante, en planifiant certaines étapes de façon à dormir en refuge ou en gîte d’étape.