Les bons conseils pour une nuit sereine en refuge
Vaste territoire montagnard, le parc national des Écrins compte une quarantaine de refuges accueillant randonneurs, familles et alpinistes. Certains refuges sont également marqués Esprit parc national. Dormir en refuge est toujours une expérience unique, une véritable immersion alpine au plus près des cimes. La majorité des refuges des Écrins ne disposent pas d’un accès routier et sont isolés au cœur de la montagne, ravitaillés à dos d’homme et, quelques fois dans la saison, par hélicoptère. En raison de leur éloignement de toute voie de communication, les refuges d’altitude sont comme des navires en mer, dont le gardien ou la gardienne serait le capitaine. L’éloignement des vallées, la rareté des ravitaillements et la difficulté de l’évacuation des déchets rendent la logistique quotidienne plus précise et complexe qu’en plaine. Comme sur un bateau, cela force à une discipline collective et au respect de certaines règles afin de faciliter le travail des gardiens et de rendre le séjour de chacun plus fluide et agréable. Voici quelques conseils afin de préparer votre visite dans l’un des refuges du parc.
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Anticiper : préparer votre venue
Tous les refuges du parc national des Écrins disposent d’un site Internet récapitulant les informations générales à leur sujet et offrant la possibilité de réserver votre séjour, ainsi que d’une page Facebook et/ou d’un compte Instagram permettant de retrouver les actualités les plus récentes (modification des dates d’ouverture, des conditions d’accès, etc). Consultez-les pour préparer votre venue. Vous pouvez aussi appeler les refuges pour avoir des informations précises, certains sont aussi joignables par e-mail.
Vérifiez que l’accès au refuge correspond à votre projet et à vos capacités. Si la plupart des refuges du parc sont accessibles aux randonneurs, certains sont situés sur des zones glaciaires, comme par exemple le refuge des Écrins ou le refuge de l’Aigle, et nécessitent l’utilisation de techniques et de matériel d’alpinisme.
Assurez-vous de l’ouverture ou non du refuge. Certains refuges du parc ont des périodes de gardiennage en hiver, pour la pratique du ski de randonnée et de l’alpinisme hivernal, d’autres sont gardés en été seulement. Certains possèdent un refuge d’hiver non gardé pour assurer la sécurité des randonneurs ou alpinistes de passage en dehors des périodes de gardiennage.
Vérifiez les conditions d’accès actuelles au refuge, sur le site web s’il comporte une section "actualités", ou mieux encore, sur les réseaux sociaux, pour connaître les éventuelles informations de dernière minute : modification de tracé du sentier, conditions difficiles, risque d’avalanche, etc.
Si le refuge est ouvert et gardé lors de votre venue, il est essentiel de réserver votre séjour et vos repas : le gardien ou la gardienne, qui gère ses stocks de nourriture et prépare les dîners pour tous les visiteurs, a besoin d’anticiper. Certains refuges sont souvent complets et il vous faudra anticiper pour espérer y trouver une place au cœur de l’été, d’autres auront régulièrement de la place et il y aura toujours un endroit libre pour vos sorties de dernière minute.
Les refuges servent le repas du soir à heure fixe, et le plus souvent tôt (entre 18 et 19h), en raison des départs des alpinistes très tôt le matin. Anticipez votre horaire de montée en prenant une certaine marge afin de vous assurer d’être à l’heure au dîner. Il n’y a pas de deuxième service et c’est la règle d’être sur place en temps et en heure.
Faire votre sac pour votre séjour en refuge
En refuge, vous dormirez souvent en dortoir avec d’autres visiteurs. En période de gardiennage, tous les refuges mettent à votre disposition des couvertures et oreillers, mais vous demandent de monter votre propre drap de sac (appelé également sac à viande) pour des raisons d’hygiène. Il est en revanche inutile de prendre votre duvet. Si vous craignez d’être dérangé par les ronflements de vos voisins de dortoir, pensez aux protections auditives, surtout que plusieurs horaires de lever sont en général proposés selon les programmes du lendemain : les alpinistes partent souvent très tôt, parfois à 3h ou 4 h du matin.
Vous n’aurez pas besoin de prendre vos propres sandales : les refuges vous prêtent des crocs. Il vous sera demandé de vous déchausser dans le sas d’entrée du refuge, d’y laisser vos chaussures de montagne et de vous déplacer en crocs au sein du refuge.
Prenez votre frontale : les dortoirs des refuges sont plongés très tôt dans l’obscurité, afin de permettre le sommeil des alpinistes prévoyant un départ aux aurores, et vous aurez besoin de votre propre source de lumière pour vous déplacer la nuit. Et pour le confort de vos compagnons de chambrée, utilisez le mode rouge la nuit.
Prévoyez de l’argent liquide pour payer votre nuit, vos repas et vos boissons : la plupart des refuges n'ont pas accès à internet, et donc pas de TPE pour les paiements par carte bancaire.
Sachez que de nombreux refuges n’ont pas accès à l’eau potable, et vous proposeront d’acheter des bouteilles d’eau. Si vous souhaitez réduire votre consommation de plastique, n’hésitez pas à prendre suffisamment d’eau, ou éventuellement votre propre système de filtration (gourde filtrante, pastilles).
Vérifiez sur le site Internet les caractéristiques du refuge et les commodités disponibles (notamment l’accès ou non à une douche et à l’électricité), afin de préparer au mieux votre sac. Sachez que tous les refuges des Écrins ne disposent pas de douche. Lorsqu’il y en a, c’est souvent en option payante, au prix de quelques euros. Si vous prenez une douche, faites en sorte qu’elle soit rapide et efficace, afin d’économiser l’eau, denrée rare en haute altitude.
Ne vous chargez pas inutilement, réduisez votre nécessaire de toilette au strict minimum.
Certains refuges ne vous proposeront pas d’accès à l’électricité en dehors de la lumière des pièces collectives (pas de prises électriques pour charger vos appareils personnels). N’étant souvent pas reliés au réseau électrique, ils doivent compter sur des groupes électrogènes et/ou des panneaux solaires fournissant leur alimentation, et ne peuvent donc se permettre de proposer ce service. Pensez à charger vos appareils en amont, ou à prendre une batterie externe.
De même, de nombreux refuges sont situés en dehors de la zone de couverture du réseau téléphonique, et ne disposent que d’un accès limité à internet, par satellite. L’utilisation du wifi est réservée à la gestion du refuge et ne sera pas disponible aux visiteurs. Si vous craignez que vos proches s’inquiètent de ne pas avoir de vos nouvelles, n’hésitez pas à les prévenir en amont de votre nuit en refuge. Soyez compréhensifs si le gardien ou la gardienne refuse de charger votre téléphone ou de vous laisser accéder à son wifi : il est normal de prioriser la gestion collective aux besoins individuels de chacun.
Souvenez-vous bien qu’un refuge de montagne n’est pas un hôtel, et que vous ne trouverez pas les mêmes prestations que dans un gîte en vallée : vous venez ici vivre une expérience différente, qui nécessite d’accepter la vie collective. Une nuit en refuge est un exercice de frugalité (à l’exception des repas, qui sont généreux), où on apprend à ne prendre avec soi que l’indispensable et à se débarrasser momentanément du superflu.
La vie collective en refuge
Une nuit en refuge est toujours un exercice de vie en communauté, avec des règles et des horaires.
Pensez bien à vous déchausser dès l’arrivée au refuge, et à vous déplacer exclusivement avec les sabots fournis à l’entrée.
Signalez votre arrivée au gardien ou à la gardienne. Il ou elle sera votre interlocuteur privilégié durant toute la durée de votre séjour en refuge. Vous entrez chez lui et c’est la première chose à faire que de se présenter en arrivant.
Certains refuges ont des règles et consignes spécifiques liées au bon usage du matériel (exemple : des toilettes au fonctionnement singulier, des portes à bien refermer pour éviter le froid…). Cela est normalement précisé sur des affiches et écriteaux récapitulant les consignes. En cas de doute, n’hésitez pas à poser la question.
Respectez les horaires, notamment de repas. Sachez que la plupart des visiteurs en refuge se lèvent tôt (randonneurs), voire très tôt (alpinistes), et qu’il vous sera probablement demandé de prendre votre petit-déjeuner et de vider les dortoirs avant une certaine heure. Un refuge n’est usuellement pas un endroit permettant de faire une longue grasse matinée.
Si vous dormez en dortoir, veillez au sommeil de chacun. Si vous vous levez très tôt, ne laissez pas inutilement sonner votre réveil, et préparez vos affaires en amont afin de ne pas réveiller tout le monde en farfouillant dans votre sac. Veillez à ne pas éblouir les dormeurs avec votre frontale, et à sortir le plus discrètement possible du dortoir. Pour faciliter le travail des gardiens, pliez votre couverture avant de quitter le dortoir pour la remettre exactement comme vous l’aviez trouvée en arrivant.
Il vous sera demandé de ne pas laisser vos déchets au refuge et il n’y aura pas de poubelle à votre disposition. On vous demandera de redescendre vous-mêmes tous vos déchets. L’évacuation des ordures est complexe et coûteuse et se fait par hélicoptère, d’où la nécessité de les minimiser. Certains visiteurs aident parfois en redescendant en vallée dans leur sac à dos quelques déchets propres en plus des leurs (comme des bouteilles d’eau vides), n’hésitez pas à le proposer si vous le pouvez.
Les repas en refuge sont usuellement simples, copieux et nourrissants, composés d’un potage ou d’une soupe, d’un plat riche en féculents, et d’un dessert. Les refuges sont soumis à une logistique particulière, qui rend parfois difficile l’accès aux produits frais : en fonction de la date du dernier ravitaillement, il est possible que votre repas comporte uniquement des aliments à longue conservation (pâtes, riz, conserves, etc). On conseille aux visiteurs d’être conciliants et d’accepter la contrainte du menu unique, qui ne correspond pas toujours parfaitement à nos goûts. Mais il vous faudra absolument prévenir en amont en cas d’intolérance, d’allergie ou de régime particulier. La plupart des refuges sont en mesure de répondre aux demandes concernant les régimes spécifiques courants (végétarien, sans gluten), à condition d’être informés en avance, mais seront dans l’incapacité d’improviser un autre menu en dernière minute.
Cas particulier : les refuges non gardés
Certains refuges mettent un abri hivernal à la disposition des visiteurs en dehors des périodes de gardiennage. Si le refuge n’est pas gardé à la date de votre venue, mais qu’il dispose d’un abri hivernal, où les conditions seront plus rudimentaires, assurez-vous des commodités disponibles (accès ou non à l’eau, présence ou non de bois de chauffage…) afin de prendre avec vous tout le matériel et les provisions nécessaires. Le gardiennage assure un vrai confort (chauffage, repas chauds, présence humaine, accès à des dortoirs et couvertures), tandis que dormir en refuge non gardé s’apparente plutôt à un bivouac hivernal : assurez-vous d’y être prêt.
Les gardiens et gardiennes de refuge sont parfois accablés par la négligence de certains utilisateurs hivernaux : portes laissées ouvertes, permettant à la neige d’entrer, abandon de déchets, besoins faits à un endroit inapproprié… L’occupation des refuges non gardés exige le plus grand respect et le plus grand civisme afin de ne pas les rendre complètement impraticables pour les utilisateurs suivants.
Savourer l’expérience
Au-delà des contraintes incompressibles énoncées dans cet article et des règles à respecter, une nuit en refuge est une expérience magique. Les levers et les couchers de soleil en haute montagne sont souvent les plus beaux de tous, une occasion unique d’admirer « l’Alpenglow », l’embrasement rouge des sommets dans le crépuscule.
En période de gardiennage, vous serez entourés de passionnés partageant votre amour de la montagne, du sport et des grands espaces, et les repas pris en commun sur de longues tables seront l’occasion de belles rencontres avec des alpinistes, grimpeurs et randonneurs aux projets inspirants. Échanger avec le gardien ou la gardienne vous permettra de recueillir de précieuses informations sur le massif et les conditions actuelles, et de découvrir un mode de vie unique au cœur de la montagne. Si le réseau téléphonique vous fera souvent défaut, les refuges sont presque toujours dotés de bibliothèques d’altitude, riches en récits de montagne, épopées alpines et beaux livres dignes d’inviter à de nouvelles échappées. C’est souvent lors d’une nuit au refuge qu’on contracte la passion des Écrins, digne de vous accompagner toute une vie…